La guerre d’Algérie et ses conséquences, a fait immigrer en 1962, des milliers de personnes vers la métropole.
Parmi ces rapatriés dont je fais partie maintenant depuis de nombreuses années (45 ans, et comme beaucoup, j’accumule tellement de nostalgie que tous les jours je nourris l’espoir d’y retourner.
Que retrouverais-je là-bas ?
Les souvenirs de ma jeunesse où tant de joies et de peines se confondent dans ma mémoire…
Revoir une seule fois ma maison de mon enfance, mon quartier en un mot ma bonne vieille ville de Constantine bâtie sur un rocher distribuant des célèbres ponts autour d’elle, baigné de soleil!
Ce voyage d’espérance, que je ne pouvais le faire avant pour cause d’insécurité en partant seul, devenait dans ma tête comme une obsession.
Devrais-je à jamais renoncer à revoir ma belle ville ?
Après ce déracinement, où tant de malheurs sont survenus à cause de ce déchirement, et après tant d’années, se serait pour moi un rêve, une utopie, que d’y retourner ….
Et pourtant il est temps pour moi, d’aller redécouvrir ce que j’ai abandonné par peur c’est sur, due surtout a l’incompréhension des hommes et à la trahison d’un homme.
« Revoir Constantine et mourir ! »
Je ne peux m’empêcher à penser à mon pauvre père qui disait toujours en s’exprimant en arabe: « que s’il débarquerait en France, celle-ci lui mangerait la tête !
Il l’avait ressenti, car six mois après son rapatriement je dirai moi, son expatriement fut emporté par un cancer ; Il avait 49 ans.
C’est qu’il ne faut pas perdre de vue que lorsque la France a débarqué à Alger en 1830, pour la conquête du pays et sa colonisation, elle a trouvé un peuple essentiellement composé de juifs et arabes vivant en parfaite harmonie depuis des millénaires…
Et si en 1962, les Arabes ont repris leur pays par l’indépendance, c’est un juste retour des choses !
Je ne m’étendrai pas davantage sur l’histoire ! Elle fut ce qu’elle fut.
Ce voyage sera pour moi, un retour aux sources mais aussi un hommage à mes parents dans un travail de mémoire.
Aux gens auxquels je leur disais que j’aurai aimé repartir en Algérie, ils me prenaient pour un fou, ou un masochiste, » tu vas être déçu etc., etc.…
Et tout à coup une lueur d’espoir se pointe à l’horizon …Oui, ce rêve du voyage qui, pour moi semblait être inaccessible, voilà tout à coup pouvoir se réaliser ! Comment ?
Tout a commencé sur mon ordinateur.
Tout a commencé sur Internet en Août 2004.
En surfant sur le site construit par Serge Gillard intitulé : « Les amis de Constantine », je me suis reconnu sur une photo d’école des élèves de l’école Diderot, et je suis rentré en contact virtuel avec mon nouvel ami qui m’informa qu’un voyage avait été fait en mai 2004, et qu’un projet pour 2005, serait en pourparlers.
Ai-je bien entendu ? Ai-je bien lu ?
Je n’en croyais pas ces déclarations ! Il est évident que j’ai sauté et peut-être le premier internaute à dire oui à ce voyage tant attendu.
C’est ainsi que tout s’est déclenché, en m’inscrivant d’abord sur le site où je pouvais obtenir quelques renseignements et ensuite par une rencontre qui a eu lieu le 15 Janvier 2005 à Nantes, pour mettre au point ce voyage à Constantine et son organisation sur place.
Nous étions une quinzaine de personnes à cette rencontre de ‘pieds noirs constantinois’ reçus par une hospitalité débordante, pensez rencontrer d’autres Constantinois comme moi, quelle aubaine ! bien sur anisette et couscous étaient au rendez-vous !
En pensant à ce séjour à Constantine, je ne pouvais m’empêcher de me poser d’innombrables questions :
Qu’allait-il se passer ? Aurais-je la force de supporter cette épreuve ? Serais-je véritablement déçu si ce retour aux sources se réalisera ? Que vais-je trouver là-bas ?
Serais-je en sécurité ? Et si par malheur je ne reviendrai pas ? Non non restons positifs il le faut ….
Au fil des jours qui passent, ce projet, à force d’en parler autour de moi, je me demandais s’il allait se réaliser.
La fébrilité des préparatifs de départ, les échanges de messages sur mon ordinateur, les attentes, les projets d’organisation, les nouvelles d’Algérie, pourvu qu’elles soient bonnes, pourvu qu’il n’y a pas grève des transports ces jours là, pourvu, pourvu ….
Malgré que je sois rassuré par Jeannine et J.Michel, je n’étais pas tranquille.
Nous sommes le 11 Mars, et toujours pas de réservation d’hôtel, j’essaie d’enfouir mon inquiétude au fond de moi, et je pense au visa que je n’ai pas encore, alors que le départ est prévu pour le 8 Mai.
J’ai décidé de partir quelques jours avant mon embarquement de Marseille, ainsi je pourrai rendre visite à ma famille, mais c’est surtout pour être le plus rapidement près de mon avion. Je sais c’est stupide, mais c’est plus fort que moi.
Je m’entends dire de Jeannine : « n’oublie pas d’amener le plus possible de veilleuses pour allumer sur les tombes » c’est vrai, que le cimetière juif de Constantine, comporte plusieurs sépultures de nos familles et déjà j’ai effectué un petit plan pour m’y retrouver !
Elle poursuit : « réserve la journée de mercredi 10 Mai car c’est le premier jour du mois de NISSAN, tu feras des prières »
Compte sur moi, je le ferai, même Maxime l’ami de Haifa, constantinois tout comme nous, m’a chargé d’allumer des veilleuses sur les tombes de ses proches.
Une pétition fut signée pour sauver la SOUIKA, d’une démolition intempestive, des actions sont menées pour sauvegarder ce patrimoine historique sur le site de Serge Gillard, c’est vrai que toutes ces habitations historiques font partie intégrante du site constantinois.
Dans la mesure où les services compétents jugent le non risque de leurs existences.
En attendant, je m’inquiète pour notre voyage, tout ce branle-bas ne va-t-il pas le perturber ?
Nous sommes le 23 Mars et toujours pas de nouvelle de réservation !
Le lendemain à midi :
Ca y est !!! Enfin, j’ai une lettre de notre ami Rhéda, qui était chargé de réserver notre Hôtel. La confirmation m’est arrivée pour l’hôtel des Princes, pièce indispensable pour obtenir le Visa.
Je me rendrai donc le plus tôt possible au consulat de Metz, pour l’établir le plus rapidement possible.
J’accuse réception à notre ami, qui a eu la gentillesse de me glisser un petit mot qui disait : nous vous attendons !
Sans plus attendre, j’ai réservé une journée pour obtenir cette pièce indispensable à la rentrée d’Algérie, Maryse ma femme m’a accompagné à Metz. Arrivés vers dans la matinée assez tôt, nous nous sommes rendus au consulat, où j’ai pu obtenir le visa.
Ouf ! Il ne reste plus que le billet d’avion que je recevrai 15 jours avant le départ. Ce départ, pour l’Algérie et Constantine sera pour moi comme un pèlerinage en mémoire de mes parents de retour aux sources et de recueillement.
La compagnie a tenu ses promesses car 20 jours avant le départ mon billet d’avion était dans la boite à lettres.
Cette fois, ça y est, je suis fin prêt.
Le compte à rebours est commencé – 22 jours avant le décollage. …-- 15 jours….
Mon cousin Edouard de Grenoble, apprenant mon départ, a voulu faire partie du voyage il sera accompagné de sa femme, la mienne ayant refusé de m’accompagner par peur mais aussi pour conserver ses souvenirs tels qu’elle les a quittés.
Plus le temps à rebours approche du jour « J » plus la joie grandit mais aussi l’appréhension, la peur, cette fois dans 10 jours …Nadira n’a pu avoir ses papiers à temps et ne pourra donc être présente parmi nous ! Quel dommage !
Tous nous souhaitent bon voyage, revenez avec des photos, des souvenirs…..
En effet, il ne reste plus que 5 jours avant de prendre l’avion pour l’Algérie.
Mme Adda, que j’ai chaleureusement remerciée me promet que son cousin douanier à l’aéroport Ain el Bey, viendra à ma descente d’avion. Des personnes extraordinairement gentilles et dévouées comme il en existe beaucoup dans Constantine.
Tout est prêt.
Comme prévu, aujourd’hui mardi 3 Mai, je rejoins Marseille, où j’avais décidé de rester jusqu’au 8 ce qui me permettra d’embrasser toute ma famille implantée dans cette ville depuis l’indépendance.
Cette fois, ça y est ! Constantine je vais la revoir, c’est sur !quelques jours avant le décollage, je me rendais donc dans ma famille Marseillaise où je me retrempais dans l’ambiance méditerranéenne.
J’étais tellement pressé de partir que mon TGV devant partir à 13 h 30 en gare de Lyon je me suis présenté à 9 h30 présent avec mes bagages, j’ai flâné, lu, déjeuné et ensuite me suis présenté au départ, étant donné que le billet a été acheté sur Internet, je me suis fait piégé en ratant le départ car le numéro de quai ne correspondait pas ! Premier souci ?
Nous, car nous étions cinq personnes dans ce cas, fallut reprendre un billet dont le départ avait lieu une heure après. Bref, un rien m’irritait avec cette contrariété !
J’avais oublié qu’il s’y trouvait un étage dans ce TGV et je cherchais ma place désespérément.
Ma cousine devait m’attendre à la gare de St-Charles et je l’avais prévenue de mon retard. Ces quelques jours passés chez Claudine et Gino ont été pour moi de vraies vacances, en effet mes cousins se « sont coupés en quatre » pour me rendre ce séjour le plus agréable possible et jamais je ne l’oublierai.
J’ai même mangé les fameux beignets tunisiens constantinois « les ftairs » que je rêvais tant, en attendant ceux de Constantine.